TRANSITION : comment je suis devenu un super papa trans
Dernière mise à jour : 21 avr.

Témoignage d'Eddy, homme transgenre devenu papa d'un petit garçon il y à 6 mois.
J’ai certainement toujours su au fond de moi que j’étais une personne transgenre…
Lorsque j’avais 14 ou 15 ans mes proches savaient que j’étais lesbienne, je l’affirmais sans détour, j’aimais être une femme lesbienne.
Plus tard, à 25 ans, je suis parti à Paris. J’ai rencontré beaucoup de personnes et j’ai participé à des manifestations et rencontres LGBTI : on parlait de non binarité, de transidentité… Ça m’a permis entre autre de comprendre que je pouvais m’autoriser à m’habiller selon les codes dits « masculins ».
Je suis revenu sur Montpellier en 2019, la crise sanitaire « COVID19 » est arrivée en 2020. Le confinement a été un grand moment d’introspection pour moi. Ce face à face avec moi-même a été une étape importante, un déclic dans ma vie. J’ai senti que mon corps ne correspondait pas à l’image que j’avais de moi à l’intérieur. Mon reflet devant le miroir ne représentait pas la personne que j’étais. À ce moment-là j’ai contacté un très bon ami transgenre qui m’a donné des références sur le sujet et des sites internet à aller voir pour avancer dans mon cheminement. C’était une véritable chance pour moi de pouvoir faire appel à lui ! Les articles, les pages Facebook et Insta que j’ai pu lire ont été une révélation : j’étais tellement heureux de me retrouver dans ces écrits. J’avais besoin de briser cette bulle dans laquelle je me sentais enfermé depuis tant d’années. C’était une grande libération pour moi : je savais qui j’étais !
Très rapidement j’ai eu besoin de faire mon coming out, de montrer aux gens qui j’étais, que mes proches me genre en masculin et m’appelle par le nouveau prénom que j’avais choisi : Eddy !
Évidemment j’avais peur…
Peur qu’on me parle d’effet de mode, qu’on ne me prenne pas au sérieux en me disant que dans quelques mois j’aurais changé d’avis. J’ai la chance d’être dans un milieu social et professionnel extrêmement ouvert : mes proches ont très bien réagi, ils étaient contents pour moi, nous avons fait une fête pour l’occasion ! L’annonce à ma famille a été plus difficile. Mon père et ma sœur l’ont mal pris. Ma mère a été extraordinaire (Elle est d’une bienveillance à toute épreuve). À chaque fois qu’elle faisait quelque chose pour aller vers moi elle me le disait. Je me souviens du jour où elle m’a dit « j’ai changé ton prénom sur mon téléphone »… Chaque histoire de vie, de transition est différente, je pense que c’est important que les proches avancent à leur rythme. En tant que personne trans, on doit accepter que notre entourage prenne le temps pour nous genrer correctement.
J’ai fait une demande en mairie pour changer de prénom. Cette demande devait être accompagnée de lettres de proches. Quelquefois les mairies demandent une attestation d’un médecin psychiatre….tout ce parcours de transition nous demande d’ouvrir une fenêtre sur notre vie privée, voire intime, à des personnes qui ne nous connaissent pas … Ce n'est pas toujours très agréable mais ça fait malheureusement partie du parcours.
Pour la suite de ma transition j’ai été contraint de passer par le parcours classique : je me suis rendu au CHU de Montpellier pour rencontrer la SOFECT (Société Française d’Étude et de prise en Charge de la Transidentité). Dans les équipes SOFECT il y a souvent des personnes transphobes qui mettent des freins et des délais interminables avant de donner l’accès à l’hormonothérapie. J’ai dû faire une thérapie d’un an avant que l’équipe SOFECT me délivre une attestation pour accéder à l’hormonothérapie (Sans cette attestation, 90% des endocrinologues ne veulent pas délivrer les ordonnances pour avoir accès aux hormones.). J’ai mal vécu cette attente…lorsqu’on a 28 ans et que l’on sait ce que l’on veut, c’est très difficile de devoir attendre des mois avant de pouvoir prendre des hormones…
Heureusement c’est pendant cette année-là que j’ai rencontré Steph, ma compagne. Elle m’a aidé à patienter et à mieux vivre cette période si longue pour moi. Une fois mon attestation en poche, j’ai été suivi par un endocrinologue qui était très fermé et très limitant pour moi. J’ai donc changé pour un endocrino beaucoup plus ouvert et bienveillant : pour la première fois j’étais suivi par une personne qui était à l’écoute de mon ressenti. Je vais le voir tous les 6 mois pour faire renouveler mon ordonnance et ajuster mon traitement.